Réception du jour de l'an au ministère de la marine

M. le vice amiral Gervais est parti, mais son Excellence M . Pelletan nous reste ! Voici défiler dans les somptueux salons du ministère de la rue Royale, comme le devoir les y oblige, et s'inclinant devant le successeur de Colbert, devant le grand maître de la marine française, les chefs de nos escadres, les commandants de nos cuirassés, que la brume a hâlés, que des fatigues sans nombre et les soleils de toutes les mers ont bronzés. Ils écoutent dans une attitude respectueuse le discours " bien senti " que leur explique le sophiste inconscient préposé à la désorganisation de notre marine, qui fait peser si lourdement sur elle la peine de son infériorité : il leur explique qu'il a interrompu la construction des cuirassés demandés par le Parlement, parce qu'il n'aime pas les bateaux qui vont sur l'eau ; il leur dit a arrêté la construction de sous-marins, dont le besoin est cependant pressant, parce que l'Angleterre a conçu un vif émoi de l'incontestable supériorité que ces redoutables petits engins de destruction allaient nous donner sur elle. Et il ajoute que s'il a désorganisé notre escadre de la mer Méditerranée, c'est " parce que l'on ne fait pas la guerre en hiver " Comme si Fachoda avait éclaté pendant la canicule ; comme si ce qui se passe actuellement au Venezuela était un divertissement printanier.

Le Petit Journal du 04 Janvier 1903