En Macédoine

Une noce orthodoxe massacrée par des turcs

Si la sagesse de l' Europe n' y met bon ordre, nous sommes exposés à voir bientôt luire en Macédoine l' étincelle qui, selon une parole célèbre, mettra le feu au continent.Il se produit, en ce moment, dans les états du sultan de Constantinople, des crimes inqualifiables, et cela malgré les réclamations réitérées des puissances. Chaque jour les soldats ottomans commettent des atrocités qui soulèvent un tollé général. A Stokoyovo, il y a huit jours, des réguliers turcs assassinent un enfant de neuf ans, fils d' Yvan Christoff. A Bis'ritza, dans le villayet de Salonique, les soldats de l' armée régulières turque organisent une promenade militaire destinée à jeter la terreur parmi la population chrétienne. Tout fuit à leur approche. Ils frappent sans pitié les hommes sans défense, vieillards, des petits enfants ; ils insultent les femmes, les enlèvent, les font disparaître. Un officier turc cherche querelle à un chrétien nommé Christo Monoff et, en plein jour, le tue ainsi que son domestique. A la fin du mois de janvier, à Boïlitza, dans le Kaaza de Ghedghéli, passait, paisible et heureux, le cortège d' une noce chrétienne orthodoxe. Chacun ne pensait qu' à fêter les jeunes mariés, charmants tous deux dans leurs beaux costumes de fête, dans leur beaux atours. Les enfants sautaient autour du nouveau couple, joyeux ; les vieillards souriaient à ces deux jeunes existences qui s' ouvraient heureuses et gaies. Personne ne pensait à mal. Tout à coup, au coin d' une rue, sous l' oeil in différent des soldats d' un corps de garde, des turcs tirent contre le cortège des coups de fusils et, tout d' abord, trois petits enfants tombèrent mortellement frappés. Puis le mari reçut une balle dans la gorge ; Le père de la mariée tomba frappé au flanc par une balle ; deux jeunes femmes furent enlevées : elles ont disparu et l' on n' a plus eu de leur nouvelles. Tous ces faits sont intolérables, les nations civilisées ne peuvent supporter plus longtemps ces crimes, les laisser impunis, et si le sultan n' est point assez fort pour faire la police dans ses états, il est urgent d' aviser à l' y aider, qu' il le veuille ou non. Il faut que ces horreurs finissent. Oui, c' est facile à dire ; mais les nations européennes sont jalouses les unes des autres ; elles se méfient des appétits des voisins. Et c 'est à qui n' interviendra pas pour ne pas tirer les marrons du feu pour le voisin. C 'est ce qui fait la force de l' homme malade de Constantinople Le sultan rouge le sait bien, il en profite ; il en abuse.

Le Petit Journal du 15 Février 1903