Confrontation de la Giriat et de Bassot
Une " loi d' humanité " permet désormais aux accusés de se présenter, assistés d' un avocat, devant le juge d' instruction . Cette à discuter ; grâce à elle, assurément, des innocents timides arrivant mieux armés contre les "pièges " du juge ; mais, d' autre parts, combien de coquins impudents échappent, grâce à elle, au sort qu' ils méritent. Il vaut mieux, il est vrai, laisser échapper dix coupables que de condamner un innocent ; c' est là une véritable répandue. Par bonheur, il arrive que certains criminels, avant d' être présentés au juge avec leur avocat, s' entretiennent quelques instants avec le magistrat qui les arrête, et quand ce dernier est adroit, il obtient parfois , en les " cuisinant " habilement, des renseignements intéressants. Ce fut le cas de M. Hamard, excellent chef du service de sûreté. Dès le premier jour, il soupçonnait de complicité Rosalie Giriat, que l' on avait trouvée si lamentablement ligotée et prête, en apparence, à expirer non loin de son amie Fougère. M. Hamard, pris de méfiance, ne perdit pas de vue une seconde la fameuse Nubienne, et quand il fut absolument sûr de son fait, il n' hésita point à la faire arrêter. Elle commença, bien entendu, à se débattre comme un beau diable ; mais M. Hamard ne se démonte pas facilement et il finit par obtenir la vérité. Trois personnes avaient pris part au meurtre : Rosalie Giriat, Bassot et César Ladermann. Ce dernier s' est tué au moment où la police se préparait à l' arrêter, mais il a laissé d' intéressantes dépositions écrites. Le juge d' instruction aura du mal à débrouiller la vérité : on l' a pu voir dès la première confrontation entre Henri Bassot et Rosalie Giriat. L' entrevue fut plutôt mouvementée. La Girat jura qu' elle avait seulement indiqué le crime à commettre et que c' est Ladermann qui avait tout exécuté sur les ordres de Bassot. Celui-ci trouva un alibi pour le jour du meurtre et parait ne point savoir ce dont on veut lui parler. C' est affaire entre Rosalie Giriat et César Ladermann. Ce dernier est mort ; mais en accusant formellement la Giriat, dont la force est peu commune, d' avoir étranglé les deux femmes. Allez donc vous y reconnaître. Quand les avocats s' en mêleront, ils feront comprendre à leurs clients que le plus sage est de tout mettre sur le compte de Ladermann, qui, étant mort, n' a plus rien à craindre. Vous verrez que ce sera lui qui aura tout fait et que ses aimables complices s' en tireront avec quelques années de prison.
Le Petit Journal du 8 Novembre 1903