Les événements d' Extrême-Orient

Uniformes de l' armée japonaise

L' évolution que, depuis un peu plus de trente ans, le Japon a accomplie vers la civilisation européenne est un fait unique dans l' histoire du monde. En quelques lustres, les Japonais ont bouleversé des moeurs, des traditions et des lois établies depuis des siècles, et, pour s' élever au rang des grands États d' Europe, ces petits hommes ont marché à pas de géants. C' est que les Japonais possèdent une faculté toute spéciale qui caractérise leur race, faculté rare, qui consiste en un pouvoir d' assimilation extraordinaire. Ils ont, peut-on dire, le génie de l' imitation. Ce génie s' est manifesté sur toutes choses, mais surtout sur les choses de l' Armée et de la Marine. Le Japon a, comme les plus grandes puissances européennes, ses cuirasses gigantesques, ses croiseurs, ses torpilleurs ; et il n' est pas indifférent de rappeler que les premiers navires de cette flotte furent construits d' après les plans et sous la direction de l' ingénieur français Bertin. En ce qui concerne l' élément militaire, le Japon possède une armée active de 190,000 hommes, commandés par 7,500 officiers répartis en 52 régiments d' infanterie, 55 escadrons de cavalerie, 19 régiments d' artillerie de campagne, 20 bataillons d' artillerie à pied, 13 bataillons du génie, 13 escadrons du train, 1 bataillon des chemins de fer. Avec sa réserve et ses milices, le Japon peut mettre sur pied 430,000 hommes. L' organisation de cette armée est due à des instructeurs européens - à des instructeurs allemands surtout, car les Allemands, qui ne possèdent pas de colonies dans le voisinage du Japon n' ont, de ce fait, rien à redouter du développement militaire de ce pays. Quand aux uniformes de ces troupes, notre gravure montre que la préoccupation des Japonais a été d' imiter aussi ceux des armées européennes. Combien éloigné de l' armure des Samouraïs de naguère, ce costume élégant et martial des vaillants petits soldats du Nippon ! Ce n' est pas au Japon que l' on tente, par des accoutrements bizarres, des vareuses trop larges, des casques et des chapeaux aux formes les plus étranges, de dépoétiser le soldat, pour mieux arriver, sans doute, à désorganiser l' armée en la rendant ridicule.

Le Petit Journal du 24 Janvier 1904