Combat sanglant dans le Sud-Ouest Africain

La garnison Allemande de Windhoek, assiégée par les Herreros, débloquée

Les Allemands possèdent, depuis une vingtaine d' années, dans le Sud-Ouest de l' Afrique, entre les territoires portugais de Mossamédès et le fleuve Orange, une colonie infertile, habitée par des tribus cafres encore sauvages, dont les principales sont les Damaras au Nord, les Herreros au Nord-Ouest et les Namakouas au Sud. Déjà, en 1896, une révolte - vite réprimée d' ailleurs - s' était produite parmi ces peuplades. L' insurrection qui vient d' éclater est beaucoup plus grave et elle portera, sans nul doute, un préjudice durable à l' influence allemande dans ces régions. Cette rébellion a eu pour cause première les exactions commises par le manque de scrupules des trafiquants allemands qui trompaient et tondaient sans vergogne les malheureux indigènes acheteurs de leur pacotille. Ils y a quelques jours, les Herreros et les Orambandjeru, au nombre d' environ vingt mille, se sont soulevés ; ils s' emparèrent du chemin de fer qui relie Swakopmund, le port principal de la colonie, à la capitale, Windoek, et bloquèrent étroitement cette ville ainsi que deux autres centres importants : Omaruru et Okahandja. En même temps, des bandes de révoltés couraient la campagne, mettant à feu et à sac les possessions des Allemands, et massacrant les colons. A la nouvelle de la rébellion, le gouverneur de la colonie qui opérait dans le Sud contre la tribu des Bondelswarth, également révoltée, reprit en toutes hâte la route du Nord. En même temps l' Allemagne expédiait des renforts, qui ont débarqué à Swakopmund, le 3 Février. La faible garnison de cent hommes qui défendait Windhoek avait pu tenir tête aux assauts des Hérreros jusqu'à l' arrivée des secours. Après un combat acharné, dans lequel les Allemands eurent quarante quatre hommes tués ou grièvement blessés, la ville a pu être débloquée. Des troupes fraîches viennent d' arriver : elles ont débarqué à Swakopmund. La révolte paraît à présent domptée, mais le prestige allemand, en Afrique, n' en aura pas moins reçu une sérieuse atteinte. Les négociants allemands, grand placiers de par le monde de marchandises truquées et de denrées falsifiées, sauront-ils profiter de la leçon ?

Le Petit Journal du 21 Février 1904