Le combat naval au large de Port-Arthur

A bord du " Caesarevitch "

Les opérations navales, quelque temps interrompues en Extrême-Orient, ont repris subitement ; la flotte de Port-Arthur a tenté, le 10 de ce mois, une sortie désespérée.

Dès le matin, l' escadre russe, composée de six cuirassés, de quatre croiseurs et de huit torpilleurs, essaya de gagner la haute mer. Mais la flotte de l' amiral Togo, plus forte en nombre, l' attendait au large. Elle comptait six cuirassés, onze croiseurs et une trentaine de torpilleurs. Les Russes commandés par l' amiral Witheft, qui avait son pavillon sur le Caesarevitch, manœuvrèrent pour se frayer un passage à travers la ligne des vaisseaux ennemis.

Après un combat très vif, ils y parvinrent vers le milieu de la journée ; mais les Japonais se lancèrent à leur poursuite, et la lutte reprit avec un acharnement terrible. Le Caesarevitch, ce cuirassé déjà si cruellement éprouvé lors des premières attaques des Japonais contre Port-Arthur, a cette fois encore particulièrement souffert. L' effort des ennemis s' est surtout porté contre lui.

C' est au large de l' île Ronde, qu' il eut à subir l' attaque des vaisseaux japonais. Notre gravure le montre à l' instant où, criblé de projectiles, malgré les obus qui éclatent sur le pont, son équipage répond courageusement au feu des Japonais. A l' approche de la nuit, après une longue et glorieuse résistance, le Caesarevitch se trouvant dans l' impossibilité de suivre l' escadre, se réfugia dans le port allemand de Kiao-Tcheou. Il marchait à la vitesse de quatre nœuds, et encore était-il obligé de brûler une quantité considérable de charbon pour atteindre cette vitesse.

Il avait son gouvernail brisé et un canon démonté. Il avait perdu ses canots de sauvetage, ses mâts étaient recourbés en forme de croix, ses cheminées sillonnées de traces de mitraille. Le pont était tordu, et il y avait au-dessus de la ligne de flottaison des trous qui avaient été bouchés avec des morceaux de bois. Le pont du cuirassé était couvert de sang et jonché de cadavres, et parmi les morts, se trouvait l' amiral Witheft, le vaillant chef de l' escadre russe de Port-Arthur.

Le Petit Journal illustré du 28 Août 1904