Le soir de la manoeuvre

Le croiseur cuirassé " Jeanne-d'Arc " prend son corps mort

On n' entend plus parler, depuis quelques jours, que de mouvements de troupes, que de rassemblements, que de batailles, que de manoeuvres sur terre et sur mer.

De tous côtés, le canon tonne. Les escadrons, les régiments, les lourds cuirassés ou les invisibles sous-marins se surveillent, s' attaquent, se poursuivent et cherchent à faire le plus de mal possible (au figuré, fort heureusement !) à un adversaire dont l' habileté et la vigilance sont mises souvent à une dure épreuve.

Aussi avec quelle satisfaction les adversaires voient-ils arriver l' heure du repos.

Ce sentiment est particulièrement visible à bord de nos cuirassés et des grands croiseurs de notre flotte, harcelés sans cesse qu' ils sont par un essaim de petits navires à peine visibles, d' une audace inouïe, qui ne laissent aucun repos à leurs vaillants équipages.

Le danger n' est plus seulement sur l' eau, il est maintenant également, sinon plus encore, au-dessous de la surface de la mer. Le sentiment d' un danger latent, qu' on ne peut éviter, est extrêmement énervant et déprimant.

Après une dure journée de manoeuvres, le croiseur cuirassé Jeanne-d'Arc a reçu l' ordre de rentrer au port.

Notre gravure de huitième page représente ce beau navire au moment où il va prendre son corps mort, un soir de manoeuvre, alors que le soleil a déjà disparu de l' horizon.

Le Petit Journal illustré du 18 Septembre 1904