Un contre cent

Le capitaine russe Lebedief défend seul un bastion de Port-Arthur

Les actes d' héroïsme accomplis, aussi bien par les Russes que par les Japonais, depuis le commencement de la guerre, ne peuvent plus se compter ; aussi quelles que soient les sympathies que professent pour l' un ou pour l' autre des belligérants, les nations spectatrices de cette lutte gigantesque, il est impossible de déclarer que les Russes ont déployé plus de bravoure que les Japonais, ou que les Japonais se sont montrés plus héroïques que leurs adversaires.

Ces jours derniers encore, les assiégeants de Port-Arthur n' hésitèrent pas, dans leur immense désir de s' emparer de cette ville, à essayer le miracle d' escalader, sans attendre l' arrivée des échelles, le mur d' une batterie du fort Zaredoutni, qui domine Port-Arthur. Un homme, le capitaine Lebedief, échappé par hasard, survivait encore à tous ses compagnons, écrasés par la mitraille japonaise.

Le héros russe se posta à la crête du mur, son revolver d' une main, son sabre de l' autre, et, tandis que les Japonais d' un bataillon d' infanterie, fous d' héroïsme, faisaient la pyramide humaine pour escalader les murs du fort, il en tua et blessa vingt-cinq de suite.

Après le troisième assaut, exténué, le capitaine Lebedief s' assit et fut écrasé par un obus,

Tout commentaire ne pourrait qu' amoindrir le récit de la fin glorieuse de ce vaillant soldat.

Le Petit Journal illustré du 25 Septembre 1904