A SAINT-PÉTERSBOURG

L'écroulement d'un pont suspendu sur la Fontanka


On a souvent, et avec raison, appelé Saint-Pétersbourg la " Venise moscovite ". La ville, qui s'étend en éventail sur les bras ramifiés de la Néva, recouvre, en effet, six grandes îles naturelles, une centaine d'îlots et une île artificielle formée par les canaux.
Les différents quartiers sont reliés entre eux par cent quatre-vingt-dix ponts ou passerelles, dont la plupart sont en pierre. On compte cependant, sur ce nombre, treize ponts en fonte, cinq en fer, deux ponts flottants et deux ponts suspendus.
C'est l'un de ces ponts suspendus, du modèle dit égyptien, jeté sur la rivière Fontanka, qui s'est écroulé récemment, en plein après-midi, au moment où un détachement de cinquante dragons le franchissait.
Environ trente chevaux ont été précipités, avec leurs cavaliers, dans la rivière, qui, en cet endroit, est large d'une vingtaine de mètres seulement. Les chaînes de suspension s'étant rompues sur les deux rives en même temps, le tablier du pont, les piétons, les voitures et les premiers rangs du détachement de dragons qui s'y engageaient ont été précipités sur la glace. Les chevaux, affolés, ont bondi par-dessus les parapets du pont et passé à travers la glace, qui était très mince à cet endroit.
Des pompiers se sont efforcés de les sauver.
Sur le détachement de dragons, qui comptait une cinquantaine de soldats et un officier, aucun homme n'a été blessé. Mais la plupart des chevaux ont dû être abattus.
On affirmait, dans le premier moment, que le fait n'était pas accidentel et qu'il fallait le rattacher aux derniers événements de Saint-Pétersbourg. Cependant, suivant les conclusions de l'enquête technique ouverte par les ingénieurs officiels, le sinistre ne serait pas dû à la malveillance, mais au mauvais état du pont.

Le Petit Journal illustré du 19 Février 1905