RENCONTRE DES FLOTTES RUSSES ET JAPONAISES

La bataille navale de Tsoushima
« La rencontre des escadres russe et japonaise semble devoir être imminente », disions-nous dans notre dernier numéro.
Or, à l'heure même où nous écrivions, la bataille s'engageait, terrible, véritable combat de géants. Cette fois encore, elle fut fatale à la Russie, dont l'escadre est à présent anéantie.
Toutes les espérances de nos alliés étaient cependant attachées à cette puissante force navale que l'amiral Rojdestvensky était parvenu à amener dans les mers d'Extrême-Orient sans avoir perdu en route un seul de ses navires.
L'escadre qui vient de succomber sous les coups des Japonais avait quitté, Libau le 16 octobre dernier. Le 3 novembre, elle était à Tanger ; vers la mi-décembre, elle doublait le cap de Bonne-Espérance. Du 3 janvier au 16 mars, elle fit une longue escale dans le voisinage de Madagascar, escale qui lui permit d'attendre les renforts que l'amiral Nebogatoff amenait d'Europe.
Le 8 avril, Rojdestvensky apparaissait dans le détroit de Malacca, puis sur les côtes de l'Indo-Chine qu'il quittait un mois plus tard pour opérer sa jonction avec Nebogatoff.
Le 20 mai, la flotte russe doublait Formose; et elle passait le 24 en vue de Shanghaï, se dirigeant vers le détroit de Corée, qu'elle atteignait le 27 au matin.
Là, Togo l'attendait avec toutes ses grosses unités de combat et sa terrible escadrille de torpilleurs.
Prévenu par ses éclaireurs de l'approche de l'adversaire, Togo quitta immédiatement sa base et se rendit, à toute vitesse, au Nord de Tsoushima. Quand il eut doublé cette île, il vit les Russes qui s'avançaient en deux colonnes il fit diriger un feu terrible sur le flanc de la colonne de bâbord et sur la tête de la colonne de tribord. Le désordre commença à se mettre parmi les navires russes; Togo les repoussa sur la côte japonaise, où tous les navires battant pavillon nippon les attaquèrent.
La nuit venue, l'amiral japonais lança contre ses adversaires une formidable attaque de torpilleurs qui acheva la défaite.
La plupart des navires russes furent coulés ou pris; mais l'escadre japonaise a subi, elle aussi, des pertes sensibles: un grand nombre de ses torpilleurs ont sombré avec les vaisseaux qu'ils étaient chargés de couler.

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La défaite de la flotte russe nous ramène au lendemain de Port-Arthur: les Japonais, maîtres de la mer et par conséquent de leurs ravitaillements; les Russes réduits à la défensive sur terre. Quoi qu'il en soit, il faut rendre justice à l'amiral Rojdestvensky, qui a fait preuve de grandes qualités d'homme de mer en conduisant jusqu'à l'entrée du détroit de Corée une flotte venue d'aussi loin; et aussi au courage de ses équipages qui ont affronté et soutenu un combat terrible, dans des conditions d'infériorité où les mettaient les circonstances, la position et les forces de l'ennemi

Le Petit Journal illustré du 11 Juin 1905