LES DÉTROUSSEURS DE CADAVRES
Odieuse profanation de tombeaux
à Colombes
Dans une propriété privée de Colombes s'élève
une chapelle funéraire où sont ensevelis les restes de cinq
personnes ayant composé la famille Gauer, famille dont les descendants
ont aujourd'hui quitté la localité.
Une rente avait été léguée au curé de Colombes
pour assurer l'entretien du monument. Cette circonstance et la singularité
de la sépulture avaient créé, dans le pays, une légende:
on disait que les Gauer avaient été très riches et qu'ils
avaient été ensevelis avec des bijoux de prix.
Or, ces jours derniers, en trouva la porte de la chapelle fracturée
; à l'intérieur, la pierre tombale avait été descellée,
et les cercueils sortis du caveau. Les cadavres avaient été,
jetés pêle-mêle. Des malfaiteurs, attirés par la
légende des bijoux, avaient voulu les voler.
C'est pendant la nuit que les misérables ont opéré.
Ils ont d'abord escaladé le mur haut, de trois mètres qui entoure
l'emplacement réservé aux tombeaux, puis à l'aide de
pinces et de pics, ils ont accompli leur besogne sacrilège.
Tout d'abord, les voleurs se sont attaqués à la première
sépulture, qui date de 1815.
Ils ont eu l'odieux, courage de remuer la terre du cercueil, pensant y découvrir
des bijoux de prix, mais tout porte à croire qu'ils n'ont rien trouvé.
Pensant être plus heureux dans de nouvelles recherches, ces misérables
se sont ensuite dirigés vers une deuxième sépulture :
celle-là toute récente, car l'inhumation ne remonte qu'à
cinq ou six ans.
Ils ont fait également sauter le couvercle et, sans respecter un cercueil
qui contenait encore une forme humaine reconnaissable, ils ont exploré
et fouillé, dans l'immonde espoir de trouver de l'or ou des bijoux.
Cet espoir fut déçu, car aucun objet de prix n'avait été
laissé dans la bière.
Sans se laisser décourager par ce deuxième insuccès,
ils se dirigèrent vers une troisième tombe, vieille celle-là
de plus d'un demi-siècle.
Ils avaient déjà soulevé, en partie, le couvercle de
plomb du cercueil lorsque, dérangés sans doute et craignant
d'être surpris, ils abandonnèrent leur horrible tâche,
laissant cette bière à demi sortie de la fosse.
Néanmoins, pour ne pas partir les mains vides, ils emportèrent
une cinquantaine de kilogrammes de plomb arraché aux sépultures
violées.
Ce n'est que le lendemain matin que, le gardien de l'enclos, qui est en même
temps le concierge de l'ancien couvent des Dames de la Providence, située
non loin de là, s'aperçut, en venant faire sa ronde, des violations
de sépultures commises pendant la nuit.
Le Petit Journal illustré du 18 Juin 1905