LES TREMBLEMENTS DE TERRE EN CALABRES.
M. Victor-Emmanuel
visite la région dévastée
Une catastrophe aussi épouvantable qu'imprévue vient de plonger
toute une province d'Italie dans la misère et le deuil. La Calabre
a été ravagée par un tremblement de terre plus terrible
encore que celui qui se produisit dans cette même région il
y a vingt-deux ans, en 1883. Alors, il y eut pourtant de formidables secousses
qui passaient comme des vagues sur le sol, faisant pencher les arbres et
tomber les maisons. Il y eut une crevasse de sept kilomètres et demi
de longueur sur trente-cinq mètres de largeur et soixante-quinze
mètres de profondeur. Des maisons, des hommes, des troupeaux tombèrent
dans ces crevasses qui se refermaient en broyant tout en un instant.
Cette fois, ce fut plus effroyable encore. Des villes ont été
détruites de fond en comble, telle la jolie cité de Milato,
qui, victime déjà du tremblement de terre de 1883, avait été
réédifiée depuis. Ce n'est plus qu'un amas de ruines.
Des régions entières n'ont plus un seul de leurs villages
debout. Les récoltes sont anéanties et les pertes matérielles
dépassent toute appréciation. Mais tout cela n'est rien encore
auprès du carnage accompli par le cataclysme. Dans la seule zone
de Trifani, on compte plus de six cents morts et de deux cents blessés.
Cette épouvantable catastrophe a eu le plus douloureux retentissement;
elle a ému la pitié générale et exalté
les sentiments de bienfaisance et de charité, non seulement en Italie,
mais aussi dans toutes nos régions françaises.
De tous côtés, des souscriptions se sont organisées
en faveur des victimes. Toutes les communes d'Italie ont apporté
leur part ; et dès le lendemain de la catastrophe, le ministre de
l'intérieur disposait déjà de 500.000 lires. Mais le
plus bel exemple est venu du roi lui-même. Non content d'avoir, à
la première nouvelle, envoyé cent mille lires pour les sinistrés,
S. M. Victor-Emmanuel II a voulu leur porter en personne des secours et
des consolations.
Cette décision prise par le roi a impressionné tout le royaume
; mais nulle part, l'émotion n'a été plus vive que
dans la malheureuse Calabre. Le jeune souverain a visité en automobile
les régions dévastées, semant sur son passage les encouragements,
les paroles miséricordieuses et les fermes promesses en des temps
meilleurs ; et son apparition dans les provinces désolées
a été pour les pauvres gens ruinés par le fléau
comme un gage d'espérance.
Saluons la noble initiative du souverain, qui, dans cette circonstance tragique,
a su s'élever d'un coup à la plus haute compréhension
de ses devoirs.
Le Petit Journal illustré du 24 Septembre 1905