LA MYSTÉRIEUSE AFFAIRE DE
BOIS-LE-ROI
Les magistrats découvrent,
dans l'orangerie de Glatigny, des instruments suspects
« C'est une nouvelle affaire Gouffé », a-t-on dit de
ce drame de Bois-le-Roi, dès qu'on en a connu les détails
par les dépositions du docteur Hébert et les aveux de la
femme Guérin-Pesnel.
Il y a, en effet, plus d'un point de ressemblance entre ce crime - manqué
heureusement - et le sensationnel assassinat de l'huissier Gouffé
qui passionna l'opinion voici seize ans... déjà !
Comme Eyraud et Gabrielle Bompard, les criminels d'aujourd'hui semblaient
avoir pris de minutieuses précautions pour faire disparaître
leur victime. Cesbron et la femme Pesnel avaient évidemment préparé
la perte du docteur Hébert. On sait qu'ils avaient acheté
une de ces grandes malles chapelières dans lesquelles il est aisé
de dissimuler un corps humain. En outre, la découverte faite par
les magistrats, dans l'orangerie de Glatigny - découverte dont
notre gravure donne une reproduction fidèle - prouve assez que
rien ne leur aurait manqué des outils nécessaires pour dépecer
le cadavre et effacer la trace du crime.
Cette propriété de Glatigmy se trouve sur le territoire
de Versailles, à l'angle des avenues Jeanne-d'Arc et de Normandie.
Elle se compose d'un terrain de 1,500 mètres de superficie, au
milieu duquel s'élève, sur un tertre, l'ancienne orangerie.
Cette orangerie est un bâtiment qui date du temps de Louis XIV.
Au mois d'Octobre dernier, Cesbron, sous le nom de Guérin, avait
acheté cette propriété ; et c'est en voyant son portrait
dans le Petit Journal que M. Régnier, gardien de Glatigny, avait
reconnu en lui l'acheteur de l'orangerie.
M. Régnier s'empressa de faire part de sa découverte au
juge d'instruction, et les magistrats décidèrent une perquisition.
Elle fut, comme on va le voir, couronnée de succès.
Dans l'ancienne orangerie proprement dite, au rez-de-chaussée,
en dehors de la table et des chaises achetées par Guérin,
les magistrats découvrirent, cachés au fond d'un vieux poêle
de faïence, un lourd marteau, des tenailles et des pinces.
Sous l'escalier qui menait à la grande salle du premier étage,
un râteau, une bêche et une pioche solide furent trouvés
sous un amas de paille.
Une cachette analogue, sous l'escalier qui mène du premier au colombier
qui surmonté le bâtiment, réservait au juge d'instruction
une découverte plus importante : une scie de boucher, à
main, de grande taille ; un rouleau de toile goudronnée de 1 m.
50 de largeur et d'une longueur de 8 mètres ; puis, dans des journaux
des 27 Septembre, 20 et 22 Octobre, un veston de molleton beige, un pantalon
gris foncé et une paire de chaussures en bon état. Enfin,
dans la cave, la hache, la hache toute neuve comme la scie, le marteau,
les tenailles en acier anglais.
En résumé, les différentes cachettes renfermaient
tout ce qu'il fallait pour tuer un homme, le dépecer l'empaqueter
et, ensuite, pour pouvoir changer de vêtements.
Le docteur Hébert pourra se vanter de l'avoir échappé
belle.
Le Petit Journal illustré
du 09 Décembre 1906
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