PITTORESQUE COUTUME DU SAMEDI-SAINT EN ESPAGNE

On sait combien curieuses sont les cérémonies de la Semaine sainte dans la Péninsule. Les processions de Séville ont une renommée européenne, et, chaque année, la foule des touristes se rend aux rives du Guadalquivir pour les admirer.
Mais, outre ces merveilleux cortèges sacrés organisés par les Confradias, confréries locales dont la fondation remonte à plusieurs siècles, il est, en Espagne, d' autres coutumes moins connues et qui ont cependant un sens symbolique fort intéressant.
Telle, par exemple, celle qui fait le sujet de notre gravure.
Elle se pratique le Samedi-Saint, à l' heure où les cloches recommencent à sonner. En certaines villes au bourgades, le peuple fait un mannequin de paille ou d' osier, qu' on habille d' oripeaux et qu' on suspend à une corde tendue en travers d' une rue. Puis, ce mannequin, on l' invective, on l' accable d' outrages, on lui tire des coups de fusil, et, finalement, on le brûle au milieu des démonstrations de la joie populaire.
C' est qu' il est, pour le peuple, la personnification de Judas, du traître qui a vendu le Christ, et ce sont de justes représailles qu' on exerce contre lui.
Curieux pays que celui où les manifestations de la foi populaire gardent encore une si pittoresque originalité.

Le Petit Journal illustré du 31 Mars 1907