LE CHEMINEAU EST LA PLAIE
DES CAMPAGNES

Il y a, sur les routes de France,
200,000 vagabonds

Le chemineau est la plaie des campagnes. Il répand la crainte sur son chemin. Ici, la sécurité est moindre encore qu' à Paris. Ce n' est plus seulement une armée, c' est tout un peuple qui erre par les chemins, vit aux dépens des paysans et échappe complètement à la surveillance de la police rurale.
Et ce peuple, quoi qu' on en puisse croire, est admirablement organisé. Il existe une franc-maçonnerie des vagabonds qui a son langage, ses signes connus des initiés. Les chemineaux s' indiquent les uns aux autres, par des figures crayonnées sur les murs, les fermes hospitalières ou les endroits dangereux. Tel ou tel signe prévient le trimardeur que, par là, se trouve la maison du garde champêtre ou la caserne de la gendarmerie. Ainsi, le chemineau est toujours sur le qui-vive, et la maréchaussée ne peut rien, ou presque rien contre lui.
Par contre, le vagabond peut tout contre sécurité des campagnards... Il y a, sans doute, des trimardeurs honnêtes, mais c' est la minorité ; tout vagabond est forcément un candidat au vol, peut-être même au crime. Et les paysans, grugés, terrorisés, se demandent avec raison ce qu' ils vont devenir, devant l' accroissement du vagabondage, si la réforme tant attendue de la police des campagnes ne vient bientôt mettre un terme à l' exploitation dont ils sont les victimes.

Le Petit Journal illustré du 20 Octobre 1907