L' infanterie coloniale

Tandis que la légion se distinguait au Maroc, l' infanterie coloniale méritait, aux manoeuvre l' admiration de tous par sa vigueur, son entrain et sa belle humeur militaire. Les officiers étrangers ne tarissaient pas d' éloges sur ces troupes alertes, solides, enthousiastes. « Voilà le vrai soldat français ! » s' écriait l' un d' eux en voyant passer les « marsouins ».
Le corps de l' infanterie de marine a, lui aussi, de superbes états de services et sa gloire est inséparable de l' histoire de nos
conquêtes coloniales.
Sa création remonte au dix-septième siècle. En l' an 1662, Richelieu créa, sous le nom de Compagnies de la mer, cent compagnies destinées à tenir garnison à bord des navires de l' État. En 1635, un régiment fut créé pour le service de la marine, qui portait le nom de Royal-Vaisseaux ; un autre, en 1669, avec le titre de Régiment-Amiral. Au siècle suivant, le corps de l' infanterie de marine fut plusieurs fois dissous et reconstitué. L' Assemblée nationale, en 1792, l' organisa en quatre régiments destinés la garde des ports, arsenaux, et au service du fusil à bord des bâtiments de guerre. Ces régiments furent supprimés en 1795.
En 1831, Louis-Philippe créait deux régiments de marine, mais sans leur donner, cette fois, de service à bord des vaisseaux. Le nombre en était porté à trois en 1838 ; en 1854, Napoléon III créait un quatrième régiment.
Enfin, en 1889, ces quatre régiments étaient dédoublés et portés à huit. Ils sont, à présent, au nombre de douze en France et de huit aux colonies.
La belle tenue de l' infanterie coloniale aux dernières manoeuvres vient à point faire honneur à cette arme d' élite que certains incidents, qui se sont passés dans nos ports, eussent pu déconsidérer.
On avait commis la faute d' envoyer dans ces régiments un certain nombre d' individus dont la place eût été plus justement aux compagnies de discipline. Il s' ensuivit des désordres, des abus, des actes d' indiscipline dont la masse des soldats coloniaux ne doit pas être rendue responsable, et qui eurent du moins pour résultat de démontrer erg haut lieu qu' ilétait urgent de renoncer à de telles pratiques si l' on ne voulait pas qu' une immense majorité d' honnêtes gens fût à jamais gâtée par une infime minorité d' apaches.
L' expérience a dû suffire. Souhaitons qu' elle ne se renouvelle pas et que l' infanterie coloniale sache garder intact la belle réputation de troupe qu' elle a su conquérir aux manoeuvres dernière.

Le Petit Journal illustré du 24 Novembre 1907