BRIMADES ENTRE DÉTENUS

A LA PRISON MARITIME DE CHERBOURG

LE SUPPLICE DU TOREADOR

On a découvert récemment que des scènes de scandaleuse sauvagerie se passaient à la prison maritime de Cherbourg.
Rentrant à bord du Valmy, après une punition disciplinaire, le marin Brisset dut passer la visite sanitaire et l' on constata qu' il avait la poitrine et l' abdomen horriblement brûlées. Il fit le récit suivant :
A son arrivée à la prison, Brisset dut comparaître devant un « tribunal » composé de six détenus, figurant le président, le commissaire du gouvernement, le capitaine de gendarmerie et deux gendarmes, qui le condamna au « supplice du toréador ». Alors, il fut déshabillé et ligoté. Le détenu qui jouait le rôle du capitaine de gendarmerie alluma une torche de papier et l' approcha de la poitrine du malheureux.
Par crainte de représailles, Brisset ne dénonça pas les coupables et supporta sans se plaindre, pendant un mois de détention, des souffrances horribles. L' enquête démontra que les prisonniers arrivants étaient soumis à cette même parodie de justice. Les uns étaient condamnés à laver le linge de leurs juges ; d' autres étaient passés « à la couverture » ; d' autres encore devaient exécuter un cake-walk qui se terminait par des voies de fait.
Il est inoui que de pareils faits puissent se passer dans une prison. Et l' opinion publique, très justement émue, réclame un peu plus de surveillance et de sévérité.

Le Petit Journal illustré du 30 Août 1908