AU MAROC

Le Rogui est exécuté par ordre du Sultan Moulay-Hafid

Moulay-Hafid a de singulières façons de tenir compte des remontrances de l'Europe.
On sait que sur l'initiative de la France, le corps diplomatique avait protesté contre les tortures infligées aux partisans du Rogui, tortures dont nous avons dit ici toute l'horreur.
Le consul de France s'était donc rendu au palais du sultan pour lui notifier la semonce de la diplomatie européenne. Moulay-Hafid promit tout ce qu'on voulut, assura même que le Rogui serait épargné. Et puis, dès que le consul de France fut parti, sa fureur sanguinaire se ralluma, plus excitée encore par l'humiliation subie. Et devant les femmes de son harem, dans la cour du palais, il fit incontinent fusiller le Rogui.
Voilà donc le sultan que M. Jaurès nous montrait si volontiers plein de douceur et de vertus quand il luttait contre Abd-ul-Aziz pour s'emparer du trône. Moulay-Hafid, à en croire notre grand prophète socialiste, n'avait pas d'instincts barbares. Ce serait un bon sultan, un sultan humanitaire et civilisateur qui ferait entrer le Maroc dans la voie du progrès.
Oui da !... va-t-en voir s'ils viennent Jean !...
Moulay-Hafid se manifeste comme le plus sanguinaire et le plus retors des tyrans. Et tout ce qu'on peut dire de lui c'est qu'il fait cruellement regretter le pauvre Abd-ul-Aziz.

Le Petit Journal illustré du 3 Octobre 1909