UNE MARCHANDE DES 4 SAISONS
ARRÊTE UN CHEVAL EXPORTÉ


Poussant sa petite voiture, une marchande des quatre-saisons, Mme Marie Boucher, se trouvait, ces jours derniers, avenue Victoria. Soudain, des cris éclatent, un cheval emballé parcourt l'avenue, se dirigeant droit sur un groupe de gamins affolés. La brave marchande n'hésite pas ; elle bondit, empoigne le cheval aux naseaux. La bête se débat, mais Mme Boucher ne lâche pas prise, et l'animal, dompté, s'arrête.
La foule s'empresse autour de la courageuse femme ; elle est blessée : un des brancards de la voiture lui a fortement contusionné le côté droit. On la porte à l'Hôtel-Dieu, où on lui donne des soins. On veut la garder, mais elle refuse. Elle n'a pas le temps de se soigner veuve à trente-quatre ans, elle a cinq gosses qui l'attendent en son humble logis, et elle s'en va un peu inquiète, disant : « Pourvu qu'on ne m'ait pas volé ma voiture ! »
Devant le commissariat de police, elle retrouva son bien; surveillé par un gardien de la paix qui, en lui demandant des nouvelle de sa santé, lui tendit quelque monnaie, disant : « Pendant que vous n'étiez pas là, j'ai fait marcher le commerce. Tout le monde voulait m'acheter ! »

Le Petit Journal illustré du 9 février 1913