ASSASSINAT DU ROI DE GREC

C'est à Salonique la ville nouvellement conquise, qu'un misérable, déséquilibré et fanatisé par la propagande révolutionnaire, a assassiné le roi Georges de Grèce.
Le souverain, dont tout le monde en France connaissait la simplicité toute démocratique, faisait une promenade en compagnie d'un seul aide-de-camp, lorsque l'assassin lui tira un coup de revolver à bout portant. La balle traversa le coeur ; et le roi mourut presque aussitôt.
Depuis le début du XXe siècle, c'est le huitième souverain ou chef d'État qui succombe à l'action anarchiste et révolutionnaire. L'auteur de ce nouvel attentat est, comme la plupart de ses devanciers, un déséquilibré ; mais n'est-ce pas justement sur ces déséquilibrés qu'agit le plus sûrement la propagande des soi-disant réformateurs sociaux qui prétendent rénover l'humanité en la noyant dans des flots de sang.
La responsabilité de tous ces crimes n'est pas seulement à ces misérables qui les commettent, mais encore, mais surtout à ceux qui les inspirent.
Quand donc, par une entente internationale, la vigilance des gouvernements se décidera-t-elle à sévir contre ces propagandistes anarchistes et révolutionnaires qui sont les vrais coupables de ces odieux attentats

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Le roi Georges de Grèce qui vient de tomber sous les coups d'un assassin était né à Copenhague le 24 décembre 1845.
Il avait été élu à l'unanimité roi des Hellènes par l'assemblée nationale grecque le 30 mars 1863, et reconnu par les puissances. Il meurt donc au moment où s'achevait la cinquantième année de son règne.
Pendant toute la durée de ce règne, le roi Georges Ier a poursuivi sans relâche. une politique d'agrandissement par le retour à la nationalité grecque des territoires jadis conquis par les Turcs.
En 1881, il avait réalisé en partie cette politique par l'annexion de la Thessalie et d'une partie de l'Épire.
Mais en 1897, une guerre malheureuse contre la Turquie arrêta quelque temps ses efforts. Depuis quelques mois, les Grecs avaient pris une éclatante revanche des désastres passés. Après une vigoureuse campagne menée par le prince héritier, ils prirent Salonique, forcèrent une armée turque de 25.000 hommes à capituler. Ces jours derniers, Janina leur ouvrait ses portes. Le roi Georges tombe en pleine gloire, ayant réalisé son rêve d'agrandissement territorial et de relèvement national.

VARIÉTÉ

Les Sourciers

La baguette divinatoire. - Aymar le maçon du Dauphiné. - Les expériences de l'abbé Paramel. - Le récit véridique d'un rabdomancien. -La science va parler.

Ne lisez pas « les, Sorciers ». Si étranges que puissent paraître les faits dont nous allons parler, il est bien évident que la sorcellerie n'y est pour rien. La rabdomancie ou divination par la baguette, appliquée à la recherche des sources donne des résultats contrôlés, affirmés par des personnes absolument dignes de foi.
Des sceptiques ont pu les nier autrefois ; mais dans un siècle qui a vu déjà se produire tant de phénomènes de radio-activité, dans un siècle où se manifestent chaque jour tant de forces jusqu'alors inconnues et dont les lois nous demeureront peut-être longtemps encore ignorées, nous n'avons pas le droit de rejeter sans les examiner des phénomènes indéniables, et simplement parce que nous n'en comprenons pas la cause.
C'est là le raisonnement que se sont fait les savants de l'Académie des Sciences, qui viennent de nommer une commission pour examiner le problème de la recherche de sources par la baguette.
Nos savants officiels montrent par là qu'ils sont un peu plus ouverts que ne l'étaient certains de leurs devanciers à l'étude des manifestations naturelles ou scientifiques dont ils ignorent encore l'origine. Ils ne nient plus de parti-pris ce que leur science ne connaît pas. C'est la preuve chez eux, d'un esprit de libéralisme et de progrès dont on ne saurait trop les féliciter.
Lorsqu'il y a un tiers de siècle environ les représentants d'Edison présentèrent à l'Académie des Sciences son phonographe, il en fut tout autrement. Plusieurs membres crurent à une supercherie ; l'un d'eux même, un médecin nommé Bouillaud, se précipita sur l'opérateur, et le secouant d'importance :
- Charlatan ! lui cria-t-il, charlatan ! vous vous moquez. de l'Académie. Avouez que vous êtes ventriloque !...
Ce savant, évidemment, manquait un peu d esprit scientifique. Il est vrai qu'il ait de bien d'autres choses, notamment de sensibilité et de coeur. C'était, en effet, le plus abominable vivisecteur qu'on pût imaginer. C'est lui, qui, pour se distraire, trépanait les chiens qui servaient à ses expériences et leur enfonçait des fers rouges dans le cerveau.
L'inconscience de cet homme était monstrueuse. Parlant d'un chien auquel il faisait subir ces effroyables tortures et qui, naturellement, hurlait sans discontinuer, il disait :
- Nous avions beau le battre, il criait tout même : il est incorrigible.
On conçoit qu'un pareil, individu n'ait rien compris au génie d'un inventeur qui, lui, était un véritable savant.
L'Académie n'a plus de Bouillaud, espérons-le... C'est un honneur pour la science française ; c'en serait un bien plus grand encore si nous pouvions dire qu'elle n'a plus un seul vivisecteur.

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Mais revenons à nos sourciers.
La croyance aux vertus de la baguette divinatoire est vieille comme le monde. De tout temps on a cru qu'à l'aide d'un rameau d'aune, de hêtre, de pommier, et surtout de coudrier, certains hommes étaient capables de découvrir les sources, les mines, les trésors cachés, et même les voleurs et les meurtriers fugitifs.
La « rabdomancie » était un art très répandu dans l'antique Orient. Les mages de Pharaon se servaient pour leurs miracles, de verges qui furent, comme chacun sait, changées en serpents par Moïse.
Moïse lui-même était rabdomancien. Ne faisait-il pas, avec sa baguette, jaillir l'eau des rochers ? Son frère aîné Aaron possédait la même faculté.
Chez nous, dès le Moyen-Age, on croyait aux propriétés magiques de la baguette. Un magicien sans baguette ne pouvait être un vrai magicien.
Et, pour que la baguette eût le pouvoir voulu, on disait dans quelles conditions il fallait se la procurer. Elle devait être de la pousse de l'année ; et on était tenu de la couper le premier mercredi de la lune, entre onze heures et minuit, en prononçant certaines paroles cabalistiques.
Le plus célèbre rabdomancien qu'on ait vu en France était un paysan du Dauphiné, nommé Jacques Aymar-Vernay. Il était né à Saint-Véran (Isère), en 1622.
Simple ouvrier maçon, il se déclara un beau jour, doué de la faculté de découvrir les sources et tous les objets cachés, au moyen de la baguette divinatoire. De fait, à maintes reprises, il indiqua de façon précise, dans les villages environnants, les endroits où l'on pouvait creuser des puits, et chaque fois l'eau jaillit en abondance.
D'autres expériences heureuses sur des objets perdus répandirent peu à peu sa réputation. En 1692, un marchand de vins de Lyon et sa femme furent trouvés assassinés dans leur cave à coups. de serpe. Les recherches de la justice étant infructueuses, on appela Aymar. En peu de jours, il retrouva, la serpe instrument du crime et fit pincer un complice qui avoua, mais il ne put jamais trouver la trace des assassins, qui s'étaient enfuis. Aymar guida bien la justice jusqu'à la frontière : mais là, chose curieuse, il semblait que sa baguette eût perdu tout son pouvoir.
Malgré cet échec, sa réputation était allée jusqu'à Paris. On l'y appela et on le soumit à des expériences pour la recherche d'objets cachés. Or, il paraît que la capitale n'était pas plus favorable à Aymar que la frontière de Suisse. Le malheureux rabdomancien pataugea sa baguette tourna à tort et à travers ; il ne réussit pas à retrouver les objets cachés, et sa gloire naissante sombra dans le ridicule.
L'air de Paris ne convenait pas au fluide d'Aymar, apparemment.
Depuis lors, la recherche des trésors aussi bien que là recherche des assassins par le moyen de la baguette divinatoire n'a guère été pratiquée. Mais il n'en est pas de même de la recherche des sources.
Il y eut, au XVIII° siècle, un certain abbé Paramel, qui écrivit sur ce procédé un livre fort probant et fort documenté l'Art de deviner les sources.
L'abbé Paramel était lui-même un maître en rabdomancie. Partout où l'on manquait d'eau, il arrivait avec sa baguette de coudrier, et se promenait par la campagne, en en tenant les deux bouts fixés contre ses deux index. Soudain, la baguette se mettait à tourner ; et, à la façon dont elle tournait, au temps de son évolution, l'abbé savait à quelle profondeur se trouvait la source.
- Creusez ici tant de mètres, disait-il, et vous rencontrerez l'eau.
Jamais, dit-on, sa science ne fut mise en défaut.
C'était là, vous l'avouerez, un merveilleux personnage. Or, savez-vous ce que disaient les sceptiques ? - Il y en avait beaucoup en ce temps-là. - Ils disaient que l'abbé Paramel était surtout un géologue très savant et un homme très ingénieux. A la nature des terrains, il reconnaissait l'endroit où devaient passer des cours d'eau souterrains ; alors, il s'arrêtait ; d'une pression imperceptible, il imprimait à sa baguette un mouvement de rotation, et le tour était joué.
Mais, direz-vous, pourquoi ce charlatanisme, alors qu'il eût suffi de quelques considérations scientifiques pour convaincre les spectateurs.
Pourquoi, répondent les sceptiques, parce que le peuple des campagnes, en ce temps-là, était tout pétri de préjugés et tout farci d'ignorance, et que, si l'abbé Paramel n'avait parlé qu'au nom de la science, on ne l'eût pas écouté, et maints villages où, faute d'eau, d'hygiène faisait complètement défaut, en fûssent demeurés privés.
Or, l'abbé était philanthrope et psychologue autant que savant. Il s'était donc résigné à cacher sa science et à la dissimuler sous un peu de surnaturel pour mieux la faire triompher.
Voilà ce que disaient des sceptiques. Mais il n'en est pas moins vrai que la recherche des sources par le moyen de la baguette de coudrier donnait souvent des résultats dans lesquels le charlatanisme n'avait aucune part.
La preuve en est que ce n'est pas d'aujourd'hui que la science officielle se préoccupe de ces phénomènes singuliers. Au mois de mars 1853. un certain Riondet avait été appelé devant une commission de l'Académie des Sciences, dont faisaient partie notamment Boussingault et Babinet, pour faire des expériences sur la recherche des eaux souterraines par la baguette divinatoire. Il avait, en effet, trouvé des sources ; et la commission avait rédigé un rapport dans lequel elle admettait l'hypothèse que la baguette pouvait obéir à un fluide impondérable.
Cependant le célèbre Chevreul n'avait pas été convaincu ; il prétendit que la docte compagnie, avait été le jouet d'un imposteur qui connaissait d'avance les sources découvertes. Et son intervention empêcha la reconnaissance officielle des vertus de la baguette divinatoire.

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Le problème, néanmoins, demeurait pendant. En dépit de l'incrédulité de Chevreul, les découvertes de sources par ce procédé se multipliaient, et des hommes parfaitement dignes de foi en étaient acteurs ou témoins.
C'est ainsi qu'il y a quelques années, comme nous avions ici même traité incidemment de la baguette divinatoire, un de nos Lecteurs, dont l'honorabilité et la véracité sont au-dessus de tout soupçon, nous signalait les résultats qu'il en avait personnellement obtenus.
« J'habite, nous disait-il, à P.., une jolie petite station balnéaire sur le bord de l'Océan, non loin de Nantes. Il y a une trentaine d'années, j'y ai fait construire une maison, et, dans le jardin, on creusa un puits, sans indication autre que celle de la commodité. On trouva bien l'eau, mais elle était insuffisante aux besoins du jardin. D'ailleurs, ce puits tarissait tous les étés, et l'hiver il n'avait qu'une médiocre profondeur d'eau.
» Or, quelque temps après, me trouvant avec des amis, je vins à parler de mon ennui de n'avoir pas d'eau dans la saison où on en a le plus besoin.
» - Pourquoi, me dit d'un d'eux ne cherchez-vous pas une autre source à l'aide de la baguette divinatoire ?
» - La baguette divinatoire ?...
» - Mais oui, cela existe. J'ai même un bouquin là-dessus.
» Le lendemain, mon ami m'apportait une brochure rarissime dont voici le titre: « Abbé C. Chevalier. La Baguette divinatoire expliquée scientifiquement, Tours, Lecesne, 1848, in-8°. »
» J'avoue que je n'avais qu'une médiocre confiance dans ce procédé qui me semblait extranaturel.. Cependant, je me mis à lire consciencieusement ce petit livre, et à mettre en oeuvre, d'après ses indications, la baguette de coudrier, coupée de façon à faire un angle aigu dont chaque branche est repliée a l'extrémité pour pouvoir tenir dans les deux mains et préconisée pour la recherche d'une source. Après bien des tâtonnements inhérents à toute oeuvre nouvelle ; j'acquis la certitude, puisque ma baguette ne tournait pas devant mon puits, qu'il ne contenait qu'une quantité d'eau insignifiante ; mais, comme je voulais faire une expérience consciencieuse, je me mis à parcourir toute l'étendue de mon jardin. Enfin, je parvins, à une dizaine de mètres environ du puits, à voir tourner sur elle-même la baguette et avec une extrême rapidité. Confiant dans cette expérience, je fis creuser un nouveau puits : l'eau y afflua d'une manière abondante et malgré les années de sécheresse, ce puits n'a jamais tari - il a 6 mètres de profondeur. »
Tel est le récit de mon correspondant ; il ajoute que maintes autres expériences tentées par lui en d'autres endroits lui donnèrent les mêmes résultats.
« Il est bien certain, dit-il, qu'un aimable farceur pourra faire tourner la baguette quand il le voudra, j'ai vu maintes fois faire cette expérience. Mais le chercheur de bonne foi qui attend patiemment le résultat ne saurait lui être comparé. Il parcourt, lentement un espace de terrain, et lorsqu'il arrive à un conduit d'eau souterrain non seulement la baguette tourne malgré lui, mais il ressent dans les muscles des bras une sorte de rétraction, de torpeur, qui laisse pour ainsi dire, le champ libre à l'instrument. Particularité à noter : on coupe une branche de coudrier ou d'ormeau : pour avoir l'angle dichotomique, il faut tailler et rogner les petites branches secondaires. Eh bien ; si on n'a pas le soin de rogner exactement, si on laisse des aspérités, ces dernières entament quelque peu la paume des mains... »
Quant aux facultés qu'il faut posséder pour faire agir la baguette, notre correspondant ajoute qu'elles ne sont point communes à tout venant. Sur un certain nombre de ses voisins et amis qu'il a soumis à l'expérience, il en a trouvé environ 50 % qui y étaient réfractaires et n'avaient pas le fluide nécessaire.
Voilà ce que dit un expérimentateur loyal et véridique ; bien d'autres hommes de bonne foi ont pu faire les mêmes remarques et les mêmes expériences. Mais la science jusqu'à présent n'avait pas encore dit son mot sur la question. Elle s'apprête à parler. Écoutons-la.
Ernest LAUT.

Le Petit Journal illustré du 30 Mars 1913