SAINTE CATHERINE, FÊTE DES MIDINETTES


Un groupe de « Catherinettes » rue de la Paix

Des derniers jours de novembre à Noël, se succèdent maintes fêtes patronales dont la tradition est respectée partout en notre pays. Celle de Sainte Catherine ouvre la série.
La légende de Sainte Catherine est empreinte d'une jolie poésie.
Fille de sang royal, Catherine eut, dès sa plus tendre enfance, la nuit, dit-on, qui suit son baptême, un songe où la Vierge lui apparut tenant l'enfant Jésus dans ses bras. Et Jésus lui dit d'une voix plus harmonieuse que le chant des archanges, qu'elle serait belle entre les belles, et qu'il voulait la choisir pour son épouse.
La tradition assure même qu'en s'éveillant, l'enfant trouva à son doigt un anneau que son divin fiancé y avait glissé.
Catherine demeura fidèle au voeu de l'Enfant-Dieu. Elle refusa tous les prétendants qu'attisèrent sa haute naissance et sa merveilleuse beauté, et demeura chaste toute sa vie, elle devint ainsi la patronne des jeunes filles.

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A Paris, nul n'ignore que la Sainte Catherine est l'occasion d'une fête pittoresque pour les ouvrières des ateliers de couture et de mode. Fête qui devrait être mélancolique, car elle se donne en l'honneur de celles qui, ayant atteint vingt-cinq ans, se trouvent, de ce fait, avoir, suivant l'expression populaire, « coiffé sainte Catherine ».
Mais d'où vient cette expression populaire « coiffer sainte Catherine » ? Deux versions prétendent en expliquer l'origine.
Jadis, dit l'une, le jour où une jeune fille se mariait, elle devait confier à la meilleure de ses amies le soin d'arranger sa coiffure nuptiale. Une croyance voulait, en effet, que cette fonction suprême portât bonheur à celle qui en était chargée et lui fît trouver sans tarder un époux. .
Or, sainte Catherine étant demeurée célibataire, cet usage ne peut jamais être observé à son égard. Il en résulte que toute fille qui reste « pour coiffer sainte Catherine » n'a aucune chance de se marier jamais.
Quant à l'autre version, elle se rapporte à la coutume, de tous les temps respectée par les jeunes filles, de couronner de fleurs l'image de leur patronne, coutume à laquelle toute jouvencelle qui se mariait devait rompre inéluctablement. De ce fait, le soin de « coiffer sainte Catherine » restait confié à celles-là seules qui ne se mariaient pas.
En tous cas, les « coiffeuses de sainte Catherine » de nos ateliers parisiens acceptent la fonction avec gaîté. Tous les ans, dans les ateliers de la rue de la Paix, il y a un grand branle-bas le 25 novembre. On fait, à grand renfort de rubans et de chiffons les bonnets les plus amusants et les plus originaux du monde, et l'on en coiffe les « Catherinettes de 25 ans » qu'on promène sur le boulevard, à la grande joie des curieux.
Sainte Catherine, dit-on, n'est pas seulement la fête des jeunes filles : elle est aussi celle des vieilles. Allons donc ! Regardez les passer ces Catherinettes, et avouez qu'elles sont joliment affriolantes pour des vieilles filles !...

Le Petit Journal illustré du 30 novembre 1913