Comment on exerce les recrues russes


D'une correspondance adressée de Petrograd à notre confrère l'OEuvre, nous détachons ce passage relatif à l'entraînement des recrues en Russie :
« En dehors des mouvements réguliers, enseignés par la théorie, le terrain a été préparé à plusieurs endroits pour des exercices pratiques fort intéressants.
» Pour l'exercice individuel, une tranchée de deux mètres de longueur. A un mètre cinquante d'intervalle sur le parapet, deux sacs remplis de paille figurent le buste de deux fantassins. Le long de ces sacs suspendus à une potence, une perche inclinée en avant représente le fusil avec sa baïonnette, ces perches pouvant pivoter à droite et à gauche.
» En avant de la tranchée, au milieu, de l'intervalle entre les deux fantassins figurés, une troisième sac de paille, avec sa perche-fusil, figure un fantassin déjà sorti pour l'assaut.
» La recrue est placée à trente ou quarante mètres de l'obstacle. Au commandement, elle s'avance au pas de charge, en poussant les hourrahs réglementaires, et elle doit, sans les manquer, parer successivement la menace des trois fusils ainsi figurés en faisant dévier les trois perches à droite ou à gauche, transpercer les trois sales de paille, sauter dans la tranchée et prendre, face en arrière, la position du tireur à genoux, pour commencer le feu contre les troupes de renfort qui pourraient déboucher des secondes lignes.
» J'ai vu, dit le correspondant de l'OEuvre, j'ai vu le même homme recommencer jusqu'à seize fois cet exercice, toujours avec vigueur, avec entrain et bonne humeur, jusqu'à ce qu'il ait réussi à abattre les obstacles rencontrés et à prendre correctement sa position dans la tranchée. J'ai vu le sous-officier qui commandait recommencer lui-même plusieurs fois l'exercice pour bien montrer à l'homme comment il fallait s'y prendre, et cela, lui aussi, avec calme et bonne humeur.

Le Petit Journal illustré du 30 avril 1916