LA BATAILLE DE LA SOMME

Les batailles, autrefois, portaient le nom des
villes ou des villages aux environs desquels elles se livraient.
Cette guerre aura bouleversé non seulement toutes les méthodes
de combat, mais encore toutes les traditions de l'histoire.
Une bataille n'est plus un engagement de troupes sur un terrain restreint.
C'est une rencontre de forces innombrables qui s'étendent sur
un espace considérable, telle, par exemple, la vallée
entière d'un fleuve ou d'une rivière.
Et c'est ainsi que les batailles d'aujourd'hui ne prennent plus le nom
des villes, mais celui des fleuves : batailles de la Marne, de l'Aisne,
de l'Yser, de la Somme.
Car le nom de bataille de la Somme, restera probablement acquis aux
actions que la grande offensive franco-anglaise a déterminées
entre cette rivière et l'Ancre..
C'est, en effet, dans la vallée de la rivière aux multiples
marécages, que la bataille a éclaté. Et quelle
bataille !... Jugez-en par cette description qu'un officier allemand
prisonnier a faite des effets de la préparation d'artillerie,
obus lourds et torpilles aériennes s'abattent sur les tranchées
allemandes.
« On voit, dit l'officier, une vague terreuse s'élever
à 100 mètres au moins de hauteur. L'éruption d'un
Vésuve en miniature. Les explosions se succèdent sans
interruption. Une épaisseur de quatre mètres de terre
ne suffit pas contre la déflagration des torpilles ; les obus
arrivent toutes les dix ou vingt secondes et cela devient infernal.
» Muets d'étonnement et quelques-uns glacés par
la terreur, nos hommes se taisent. Des éclairs éblouissants
se montrent au loin, et avec un sourd grondement, de lourds obus s'abattent
sur les tranchées. Les gros calibres, jusqu'aux monstrueux 380,
font entendre leur voix épouvantable. C'est le moment où
une tempête de feu et d'acier éclate dans toute sa violence.
Elle gronde à l'horizon, elle s'approche et roule sur les airs
son énorme fardeau. Partout les éclairs jaillissent sur
un plus vaste espace et le fracas redouble. Un lourd nuage de terre
et de fumée couvre la voûte du ciel qui, peu à peu,
semble s'ouvrir et se fermer. D'horribles convulsions secouent et déchirent
le sol. Il semble que tout est menacé de destruction.
Alors l'infanterie entre en scène, et rien ne résiste
à son élan.
Et c'est ainsi que partout, entre l'Ancre et la Somme, les Allemands
ont dû reculer devant l'offensive concertée des deux armées
alliées.