LE DERNIER CRIME DES ALLEMANDS

 


ils traitent en esclaves les populations des pays envahis

Non contents de toutes les vexations qu'ils leur ont fait subir depuis deux ans, les Allemands en sont venus à traiter en esclaves les habitants de nos villes du Nord.
Au mois d'avril dernier, sur l'ordre du général von Graevenitz et avec le concours du régiment d'infanterie n° 64 envoyé par le grand quartier général allemand, environ 25.000 Français, jeunes filles de 16 à 20 ans, jeunes femmes et hommes jusqu'à 55 ans sans distinction de condition sociale ont été arrachés de leurs foyers à Roubaix, Tourcoing et Lille, séparés sans pitié de leur famille et forcés à des travaux agricoles dans les départements de l'Aisne et des Ardennes.
A partir du 9 avril, les Allemands commencent à opérer par rafles, soit dans la rue, soit à domicile, enlevant pêle-mêle hommes et jeunes filles, les expédiant on ne sait où. Mais bientôt la mesure s'exerce de façon méthodique. La population est invitée à se tenir prête à une évacuation forcée. Le maire, l'évêque protestent : rien n'y fait.
L'opération se poursuivit la nuit pendant toute une semaine.
Vers trois heures du matin les rues étaient barrées par la troupe, baïonnette au canon, mitrailleuses en travers de la chaussée contre des gens désarmés.
Les soldats pénétraient dans les maisons, l'officier désignait les personnes qui devaient partir et, une demi-heure après, tout le monde était emmené pêle-mêle, dans une usine voisine, et de là, à la gare où s'effectuait le départ.
Et, par un raffinement singulier, les bandits firent conduire le misérable troupeau d'esclaves à la gare, musique en tête.
Les victimes de cet acte brutal montrèrent d'ailleurs le plus grand courage et partirent en criant : « Vive la France » et en chantant la Marseillaise.
De toutes parts, ce nouveau crime des Boches a soulevé la conscience des peuples. Des protestations sont venues du monde entier. Les Boches y ont répondu en recommençant les rafles et les évacuations forcées. A Roubaix, ils prirent sept mille hommes et deux mille femmes qu'ils déportèrent en Allemagne pour y accomplir des travaux agricoles.
Quand un peuple commet de pareilles infamies, c'est pour des siècles qu'il se met de lui-même au ban des nations.

Le Petit Journal illustré du 27 août 1916