Le Jour des Morts sur le front

Beaucoup de familles eussent désiré
pouvoir aller, à l'occasion de la Toussaint, prier sur la tombe
de ceux des leurs qui, tombés au service de la patrie, sont enterrés
dans la zone des armées. Les nécessités militaires
n'ont pas permis que ce pieux désir pût être exaucé.
Les parents des soldats morts au champ d'honneur et enterrés,
soit au lieu même où ils tombèrent, soit dans les
cimetières des villes et des villages dont l'accès demeure
interdit tant que dure la guerre, ne pourront que célébrer
de loin le cher souvenir des disparus.
Mais du moins ont-ils pu avoir l'assurance, que la tombe de l'être
cher n'était point abandonnée. De toutes parts, sur le
front, les camarades des défunts ont rivalisé de zèle
pour décorer, à l'occasion de la Toussaint, les sépultures
des héros morts pour le pays.
En maints villages les habitants se font un devoir d'entretenir ces
tombes qui se trouvent parfois en pleins champs et qu'ils évitent
de bouleverser au passage de la charrue.
De toutes parts, les pâles fleurs d'automne, les dernières
roses, les chrysanthèmes ont été apportés
sur les tombes des soldats que l'on décore également de
drapeaux.
Ainsi, les héros disparus dorment leur dernier sommeil à
l'ombre de l'emblème sacré pour le triomphe duquel ils
sont morts
Le Petit Journal illustré
du 5 novembre 1916