Des déserteurs allemands passent la Meuse

glacée pour se réfugier en Hollande

Malgré les mesures sévères prises par les autorités allemandes pour empêcher les désertions, celles-ci sont de plus en plus nombreuses.
Cependant, on a pris sur les frontières, tant en Belgique qu'en Allemagne même, les précautions celles-ci sont de plus en plus sévères pour arrêter les déserteurs. Il y a des postes à toutes les routes, des réseaux de fils barbelés dans les champs. N'importe ! les soldats se sauvent en foule et tentent tout pour passer la frontière, préférant le risque d'être repris, la prison, la mort même, à la cruelle condition qui leur est faite par l'impitoyable discipline à laquelle ils sont soumis, et par les privations qu'ils endurent.
Un journal hollandais écrivait déjà, à la fin de l'an dernier :
« Le moral des troupes allemandes commence à devenir exécrable : Rébellions, désertions, suicides, il ne manque presque plus rien.
» Les actes de désespoir, à mesure que cette affreuse guerre se prolonge, sont de plus en plus fréquents dans l'armée allemande. Il n'y a pas de jour où l'on n'enregistre plusieurs suicides dans les casernes et les postes de Bruxelles.»
Depuis quelque temps, les suicides et les désertions se produisent plus seulement parmi les soldats de l'armée allemande occupant la Belgique, mais même parmi ceux qui se trouvent en Allemagne.
Cette recrudescence de fuites et d'actes de désespoir s'explique d'ailleurs par les conditions économiques dans lesquelles se trouve le pays et par les souffrances qui en résultent pour les soldats.
Le même journal hollandais cité plus haut observe d'ailleurs que ces désertions sont probablement favorisées par ceux-là mêmes qui sont chargés de les empêcher.
« Les hommes du landsturm à la frontière ferment volontiers l'oeil pour les amis qui « en ont soupé », en attendant de « lever eux-mêmes la séance ».
Or, dernièrement, tandis que la Meuse était, encore gelée, un certain nombre de soldats des garnisons voisines de la frontière à Ruremonde, en ont profité pour passer en hollande. Les sentinelles ont bien tiré quelques coups de fusil, mais trop tard ; les déserteurs étaient déjà de l' autre côté de l'eau, à l'abri des dangers, des privations.
Et voilà comment s'opère l'invasion des Pays-Bas par les Boches !

 

Le Petit Journal illustré du 18 mars 1917