BARBARIE ALLEMANDE


A maintes reprises, on a signalé l'affreuse barbarie les équipages de sous-marin allemands, canonnant les barques dans lesquelles s'étaient réfugiés les matelots des navires torpillés.
Rappelez-vous le torpillage des chaloupes du Falaba. Le sous-marin allemand, après avoir coulé le navire, s'acharnait sur les canots, et les marins boches, debout sur le pont, ricanaient et faisaient des grimaces aux malheureux naufragés qui essayaient de s'accrocher aux épaves.
Rappelez-vous le torpillage de l'Aguila et ses chaloupes canonnées par le sous-marin U-28.
Ces jours derniers sur la côte norvégienne avoisinant Stavanger, on trouvait une bouteille contenant le message suivant :
« Esther, de Esbjerg, coulé par sous-marin allemand le 12 avril. Les canots du navire ont été bombardés par le sous-marin, qui nous a abandonnés par grosse mer, avec une tempête nord-ouest. Il est probable que nous survivrons pas à la nuit. »
Enfin, voici un fait plus horrible encore. Lisez cet extrait d'une lettre adressée ces jours derniers à son conseil d'administration par le directeur d'une sardinerie de la côte bretonne : « Deux bateaux sardiniers, faisant la drague dimanche dernier à vingt milles de terre, ont été coulés par un sous-marin allemand. Les deux équipages, vingt et un hommes, réfugiés dans les agrès, ont été fusillés jusqu'au dernier. Un troisième bateau n'a dû son salut qu'à un grain de grêle qui l'a masqué un moment, assez pour pouvoir rentrer toutes voiles, au risque de chavirer sous la rafale. De ce fait de sauvagerie, il y a eu en un instant soixante-trois orphelins de plus dans le village. »
Les deux bateaux sardiniers dont il s'agit ici sont les barques d'Audierne Providence-de-Dieu et Jolie-Brise.
En communiquant cette navrante information à notre confrère le Journal des Débats, son correspondant y ajoute les réflexions suivantes, auxquelles s'associeront les gens de coeur de tous les pays :

- Jusqu'à présent, en coulant paquebots, cargos et voiliers, les pirates laissaient au moins à l'équipage, sinon toujours au moins dans certains cas, la possibilité d'essayer de se sauver dans les canots du bord.
Mais que dire de la cruauté de ces bandits qui n'hésitent pas à couler à 20 milles au large les modestes chaloupes de nos pauvres pécheurs, et à massacrer à coups de fusil jusqu'au dernier ceux qui ont réussi à s'accrocher à quelques agrès ? Ne vous semble-t-il pas que cet abominable forfait, mérite d'être livré à l'indignation de tous, tant il est révoltant ?

 

Le Petit Journal illustré du 6 mai 1917