LE TABAC Le fructueux monopole C' est celui du tabac. On s'imagine généralement qu'il date du premier Empire. Erreur qu'il convient de rectifier . C'est à Napoléon, il est vrai , que nous devons l'organisation actuelle et la création de cette ineffable administration qui s 'appelle la Régie. Mais la monopole, c'est Louis XIV qui l'institua en 1674 . Et déjà, sous Louis XIII, un impôt frappait le tabac. En 1629, la consommation du « petun » - c 'est ainsi qu'on appelait alors le tabac - commençait à ce répandre en France. Richelieu pensa qu'il pouvait être opportun d'en tirer profit pour l'Etat. Dans ce but il fit signer au roi Louis XIII, à la date du 17 novembre 1629 , un édit ainsi conçu : « Sur l'avis qui nous a été donné que, depuis peu de temps, on fait venir des païs étrangers quantité de pétun et de tabac sans payer aucun droit d 'entré, sous prétexte qu'il n 'a été compris dans les anciens tarifs et pancartes; ce qui aurait donné lieu d 'en faire apporte grande quantité en notre Royaume, de sorte que nos sujets à cause du bon marché en prennent à toute heures, dont ils reçoivent grand préjudice et altération en leur santé....» En conséquence, un droit d 'entrée de trente sols par livre était établi sur les tabacs étranger. Tel est le premier acte fiscal touchant le tabac. vous y pouvez constater cette belle hypocrisie qui est la marque du fisc en tous pays , et qui consiste à dissimuler sous des airs de sollicitude pour les contribuables, le féroce appétit de l'état. Quant au monopole, il date de 1674. A cette époque, la culture du tabac s'était répandue dans dans plusieurs provinces, notamment en Lorrain, en Guyenne , en Gascogne, et cette production nationale, n'étant assujettie à aucun droit, faisait tort à l 'importation des tabacs étranger qui seule profitait au Trésor. Déjà, à Venise, dans les États pontificaux, en Autriche, en Portugal, le monopole du tabac avait été établi. Louis XIV n'hésita pas à faire de même. « Tout le tabac du cru de notre Royaume ? disait son ordonnance du 27 septembre 1674 , îles françaises de l 'Amérique, tabac mastiné du Brésil, et autres venant des pays étrangers, en feuilles, en rouleaux, en cordes, en poudre, parfumé et non parfumé sera à l 'avenir vendu et débité tant en gros qu'en détail par ceux qui seront par nous préposés , au prix que nous avons fixé, savoir, celui du cru du Royaume, à vingt sols, celui du Brésil à quarante sols la livre ...» Le monopole était créé...Fumeurs, mes frères, je crois bien qu'après la révolution de l'Edit de Nantes, c'est la plus vilaine action que l'histoire puisse reprocher au Roi-Soleil ! Le privilège que l'Etat s'était arrogé sur le tabac fut affermé à un certain Jean Breton, moyennant 600.000 livres par an. Ce fut une bonne affaire pour le fermier ; Une si bonne affaire que, peu à peu, le prix du fermage augmenta , laissant cependant des bénéfices de plus en plus grands aux tenanciers de la ferme. Au XVIII siècle , la mode de priser, si répandue à la cour et à la ville, rapportait gros à l'état. En 1785 ? la livres ; le tabac se vendaient, en moyenne, trois livres six sols et rapportait 32 millions de livres annuellement . *** La Révolution supprima le fructueux
monopole et proclama la liberté de la culture et de la vente.
Seul, le tabac étranger demeura imposé à l'entrée,
comme au temps de Louis VIII. Mais la production indigène suffisant
aux besoins des consommateurs, l'importation étrangère
se trouva réduite à rien, et le fisc perdit une de ses
meilleures ressources. *** Dernièrement, il y eut un incendie
à la manufacture des tabacs de Pantin. Un de nos confrères,
au lendemain du sinistre, alla interviewer le directeur de cet établissement. Ernest Laut. Le Petit Journal du 12 Octobre 1919
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