Les grands faits
LA TRAVERSÉE DU SAHARA
Depuis que la France colonise le Nord-Ouest
africain, on a toujours cherché à relier, d'une façon
pratique, l'Algérie et nos possessions du Niger. Sans doute le problème
va-t-il être résolu par l'emploi de l'automobile. C'est pour
le prouver, d'ailleurs. qu'une expedition s'est mise en marche à
travers le Sahara. Bien entendu, les voitures employées sont d'un
modèle spécial, Leurs roues arrière sont remplacées
par des appareils à chenilles, comme les tanks, pour éviter
l'enlisement dans les terrains sablonneux. Chaque véhicule emporte
300 litres d'essence et 120 litres d'eau en plus des provisions indispensables.
Telles quelles, ces autos atteignent une vitesse de 20 kilomètres
à l'heure, pour le moins, et parcourent en deux jours une distance
que les caravanes mettent habituellement vingt jours à couvrir.
La Semaine
La langue française en Belgique.-
Superstition du jour de l'An.- Les trois B.
C'est une question grave pour notre influence qui s'agite en ce moment en
Belgique. La Chambre des Représentants de ce pays a voté,
à une majorité infime, il est vrai, la flamandisation de l'Université
de Gand; et cette attente à la vieille suprématie de la langue
et de l'esprit français a soulevé l'opinion, non seulement
en Wallonie, mais même en pays brabançon.
La Belgique, nul ne l'ignore, est habitée par deux races distinctes
: au nord, les Flamands, peuple germanique, parlant un dialecte dérivé
de l'allemand ; au midi, les Wallons, qui sont des Gallo-Romains comme nous
et parlent notre langue.
Or, de même que dans tous les pays - tels l'Autriche et la Suisse
- qui se trouvent dans ces conditions, l'antagonisme des races et des langues
devait fatalement se faire sentir en Belgique.
Pourtant, il fut longtemps avant de se manifester. Ce n'est guère
qu'après 1870 que sous l' influence de l'Allemagne triomphante, les
flamingants commencèrent la lutte contre la France et l'esprit français.
Les Wallons, heureusement, sont gens à ne pas se laisser faire. Mais
c'est déjà trop que les Flamingants remportent des succès
comme celui de ces jours derniers et que les Représentants belges
ne tiennent pas mieux compte de ce que leur disait un jour un d'entre eux,
dans son simple bon sens :
« Avec le français, vous ferez le tour du monde, avec le flamand.
vous ne ferez pas même le tour de la Belgique.. »
Je pense qu'il faudrait au moins pousser
jusqu'au coeur de l'Afrique pour trouver des peuples réellement primitifs.
Nous autres. Européens, nous sommes des peuples à l'esprit
fort. La civilisation nous a rendus sceptiques. Mais cela ne nous empêche
pas d'avoir gardé bon nombre de petites superstition ancestrales.
Nous ne les avouons pas toujours, mais, à certaines époques
de l'année, nous ne laissons pas d'en ètre préoccupés.
J'ai ouï dire que dans certaines de nos provinces, bien ses jeunes
filles, quand minuit sonne entre 31 décembre et le premier janvier,
ne manquent pas de se regarder dans un miroir ou dans une cuve d'eau, ce
n'est pas, en effet, leur propre visage qu'elles espèrent y voir
; c'est celui du jeune homme qui viendra dans l'année les demander
en mariage.
Cette nuit-la, beaucoup de demoiselles des campagnes dorment mal. Elles
doivent faire attention à tous les cris poussés par les animaux
du voisinage : aboiements des chiens, gloussements des poules, hennissement
des chevaux, mugissements des boeufs, bêlements des chèvres.
L'amoureux viendra certainement du côté où l'un de ces
bruits se sera produit aux environs minuit.
Mais les tradition populaires ne s'attachent pas seulement aux bruits de
la nuit. Vous trouverez peut-être, en observant ce qui se passe autour
de vous, dans la journée du 1er janvier, l'indice de quelque espoir
de joie pour l'an qui vient.
D'abord, le matin, ne manquez pas, en descendant de votre lit, de vous lever
du pied droit. C'est du bonheur pour toute l'année.
Remarquez bien aussi les voitures que vous rencontrerez dans la rue et la
couleur de leurs lanternes.
Si le premier véhicule qui s'offre à vos regards est une voiture,
ou une automobile, de maître, c'est un signe de richesse et de réussite
; si c'est un fiacre, cela signifie médiocrité ; un chariot,
travail ; une simple charrette, misère ! la lanterne verte indique
la malchance, la lanterne rouge le succès. Si le numéro du
fiacre est impair, c'est un présage heureux.
Enfin, tâchez de réussir le fameux problème des trois
B. Si vous rencontrez successivement un Boiteux, un Bossu et un Borgne,
la veine ne vous quittera pas de toute l'année.
Ce n'est pas commode évidemment ; mais on voit ce jour-là
dans nos rues tant de pauvres diables plus ou moins infirmes qu'il n'est
pas impossible que vous fassiez cette triple rencontre.
Et, puisque voici le jour des voeux, c'est la même que je vous souhaite
en terminant.
Ernest LAUT.
Le Petit Journal Illustré du dimanche 31 décembre 1922